Etienne de Villers-Sidani, M.D.,ÌýFRCP(C), est un neurologue spécialiste des troubles cognitifs. Il s’intéresse au rôle de l’expérience sensorielle et de la plasticité du cerveau dans l’apparition et le traitement des dysfonctionnements cognitifs. Une neuroplasticité qui se définit par la capacité du cerveau à remodeler ses connexions en fonction de l’environnement et des expériences vécues. Le Dr de Villers-Sidani décrit sa fascination pour le cerveau depuis son enfance, ses journées de travail atypiques, et comment les collaborations nationale et internationale permettent une meilleure compréhension du fonctionnement du cerveau.
Comment avez-vous choisi votre domaine ?
Depuis que je suis tout petit, le cerveau me fascine. Quand j’avais environ huit ans, chaque fois que nous passions à côté de l’Institut-hôpital neurologique de Montréal, mon père me parlait du Dr Wilder Penfield, le premier directeur du Neuro, et de ce qu’il avait accompli. C’est à ce moment-là que j’ai su que je voulais devenir neurologue.
J’ai aussi été marqué par une plaque à l’extérieur du Neuro qui dit : « le problème de la neurologie c’est de comprendre l’homme lui-même ». J’ai toujours été fasciné par les choses complexes et les défis, et c’est donc de fil en aiguille que je me suis retrouvé ici, au Neuro.
À quoi ressemblent vos journées de travail ?
Mes journées de travail sont très chargées. Je porte plusieurs chapeaux.
Je suis spécialisé en neurologie cognitive. En clinique je vois des gens qui ont des problèmes au niveau de la pensée, et souvent des problèmes de mémoire et de jugement qui sont causés par des maladies neurodégénératives. Ces patients, je dois les accompagner, leur donner l’heure juste au sujet de l’évolution de leur maladie. Je leur explique les défis auxquels ils seront confrontés. Il est aussi primordial que j’informe et outille leurs proches.
En laboratoire, j’étudie comment les sens, comme la vue et l’ouïe, peuvent nous renseigner sur la santé du cerveau. On peut ainsi comprendre ce qui se passe dans les circuits neurologiques et arriver à suivre l’évolution et les changements du cerveau au fil du temps. C’est dans ce contexte de laboratoire que je supervise des étudiants en maîtrise et au doctorat et que j’ai le privilège d’enseigner.
En parallèle j’ai aussi fondé une compagnie, Innodem, pour aider à développer des outils concrets, comme la , pour suivre l’évolution des maladies neurodégénératives, comme la maladie d’Alzheimer, le Parkinson et les troubles cognitifs liés à la sclérose en plaques.
C’est une charge de travail qui est importante, mais c’est très excitant de pouvoir lier ces trois aspects : la clinique, la recherche, ainsi que la mise en application de ce que nous apprenons… et c’est sans compter que j’ai quatre jeunes enfants ! En tout, ça me fait de très bonnes journées.
À quelles questions voulez-vous répondre avec votre recherche ?
La question qui m’intéresse le plus c’est comment nos comportements et expériences de vie, en tant qu’être humain, façonnent les circuits de notre cerveau. Le cerveau a cette très forte capacité de modifier et remodeler ses circuits : on appelle cela la neuroplasticité. Cette neuroplasticité nous façonne d’une manière fondamentale.
Par exemple, il n’est pas écrit dans nos gènes quelle langue on va parler. Cela dépend d’où on va grandir et de ce qu’on va entendre pendant notre enfance. Et le fruit de la plasticité, c’est cette capacité à acquérir de nouvelles compétences et connaissances qui vont nous permettre d’avoir un comportement qui est mieux adapté à notre vie de tous les jours.
Notre cerveau subit des changements au fil du temps, pendant notre développement et lors du vieillissement. Des questions me viennent alors spontanément à l’esprit : quels sont les changements liés à l’âge qui peuvent être dégénératifs ? Et, inversement, quels sont les changements qui pourraient être plutôt dus à notre vie de tous les jours ?
En comprenant ce qui est dû à la plasticité, on pourrait espérer renverser des problèmes que certaines personnes vivent lors du vieillissement. Si on arrivait à départager ce qui est de nature dégénérative de ce qui est peut-être plutôt lié à l’expérience de vie, on pourrait trouver de nouvelles stratégies qui permettraient de minimiser l’impact du vieillissement sur le cerveau.
Travaillez-vous en collaboration avec d’autres chercheurs et cliniciens ailleurs au Canada et à l’international ?
Ce qu’il y a de fantastique quand on travaille au Neuro, c’est qu’en raison de la renommée internationale de l’institution, il nous est très facile de faire des connexions partout dans le monde. J’ai des collaborations un peu partout au Canada et aux États-Unis, et des collaborateurs au Brésil et en Chine. Pour moi cette diversité et cette possibilité d’interagir avec des gens partout dans le monde sont très enrichissantes, ça donne un point de vue plus global de la situation. Ça permet de réaliser à quel point il y a quelque chose de commun entre nous tous. Ça permet vraiment d’avoir une meilleure vision du fonctionnement du cerveau dans toutes ses facettes. Je suis très reconnaissant de pouvoir travailler au Neuro pour cette raison.
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